Un atelier jeunes et un atelier adultes à Beauvais en 2007

Compte rendu de deux ateliers : adultes et jeunes en 2007 à Beauvais

 

COMPTE RENDU ATELIER ADULTES DE BEAUVAIS 2006-2007

L’Ecume du Jour, bistrot d’échanges de savoirs, a mis en place cet atelier avec l’aide et les financements de la mairie de Beauvais.

Marie-France Duflot a animé cet atelier. Matthieu Suire l’a rejointe les 23 et 24 mai.

L’Atelier s’est déroulé à l’écume du Jour, dans la salle d’expositions, 16 mercredis de 18h30 à 21h du 10 janvier 2007 au 24 mai.

Pour faire connaître cet outil, L’écume du jour a fait venir la compagnie NAJE qui a joué au Cinespace, le 28 septembre, le soir devant 250 personnes.

Pour favoriser la venue d’adultes à cet atelier, 3 ateliers le soir en novembre et décembre 2006 ont été organisés. Nous avons eu une grande fréquentation, pendant cette phase, jusqu’à 22 personnes.

Malgré 2 arrivées tardives et 3 départs, le groupe s’est constitué rapidement : 2 hommes, 10 femmes, public de 24 à 55 ans, 5 personnes ayant un emploi régulier (alphabétisation, éducatrice, graphiste…), les autres sur des emplois aménagés et très précaires (Emmaüs, serveuse dans un bar, deux d’entre elles à l’écume du jour) une personne avec le RMI, 3 personnes en formation : CAP de cuisine dont un jeune d’un foyer. Au total, 12 personnes très dynamiques, porteuses du projet et déjà familiarisé avec des pratiques solidaires, puisque fréquentant le Bistrot d’Echanges de Savoirs.

Le groupe s’est constitué très rapidement.

Certaines se connaissaient par ailleurs, d’autres ont été rapidement intégrées. Les histoires confiées étaient tellement intimes que cela a avivé la solidarité entre les personnes. Il a fallu par fois redire la règle de non-jugement car ce sont pour la plupart des personnes en grande difficulté personnelle et qui se sont construits des carapaces pour moins souffrir. Toutes mes propositions étaient accueillies avec enthousiasme et jubilation. Je me suis sentie portée par ce groupe, qu’ils m’offraient toute leur confiance. C’était un groupe très prolixe. A chaque fois que j’annonçais qu’on allait enfin choisir les histoires pour le spectacle, une personne prenait la parole et nous faisait encore un récit de vie qu’on devait improviser et faire forum pour trouver des aides et des pistes de réflexion. Mais c’est cela avant tout notre travail.

Je commence un atelier par des jeux. Et ces adultes adoraient ça. C’était un vrai plaisir de les voir retrouver le plaisir enfantin et de se confronter à des situations inédites : les aveugles, la bouteille saoûle, les bandes rivales… Une femme a mis longtemps avant de ne plus rire lors des exercices. Elle a compris qu’elle avait besoin de sa concentration et de ne pas rire pour elle et pour les autres. Ses progrès ont été immenses. Chaque atelier finit par un « ça va? ça va pas? », petit bilan personnel, devenu rituel et tout de suite investi. L’écoute dans ce groupe a été exceptionnelle, chacun en empathie avec les histoires des autres. Nous avons abordé les thèmes suivants : la violence conjugale, l’infidélité dans le couple, l’amour éconduit, la rumeur, la relation aux parents, l’éducation des enfants, la maltraitance, la justice, le rôle des éducateurs dans une famille, les conseils municipaux, le harcèlement des institutions sur les plus précaires, la mort d’un proche, la violence policière, la disparition des sans papiers. Sur tous ces sujets, nous avons fait forum. Nous avons aussi joué des moments de bonheur, de reconnaissance.

Après ce long temps de récits et de forum, nous avons enfin choisi ensemble 4 histoires, représentant les différents thèmes abordés : la violence dans le couple et ce qu’en vivent les enfants, la violence policière, la violence de l’institution judiciaire, Nous nous sommes mis d’accord sur le titre de notre spectacle : « Le monde allant vers… »

Lorsque j’ai apporté les scènes écrites, les personnes ont été prises d’angoisse : comment pouvait-on apprendre par coeur? Comment être en émotion dans une répétition? Nous n’avions plus que 4 séances. J’ai senti de l’inquiétude. Lors des répétitions, certaines me regardaient ou coupaient la scène: « Alors ça va? Je l’ai bien fait? » et puis après avoir été rassurées, elles ont mis leur énergie et leur sympathie pour que le projet soit réussi.

La veille de jouer, Matthieu Suire, comédien à la Cie NAJE, nous a rejoints pour prendre certains rôles d’oppresseurs, difficiles à porter en forum. Nous avons répété dans le théâtre de Beauvais et nous avons retravaillé les pistes de forum. Le lendemain à 18 heures, nous nous y sommes retrouvés pour faire un dernier filage avant le spectacle de 19h45.

Nous avions pu le 7 mars travailler une première fois dans le théâtre, pour voir l’espace, la place de la voix. Ce fut une soirée apaisante et angoissante à la fois. Cette grande salle de 700 places, nous a fait un peu peur et nous a donnés l’énergie pour la maîtriser.

Nous avons joué « Le monde allant vers… » à 19h45 au théâtre de Beauvais, devant 150 personnes. C’était un tout public très populaire dont une partie avait déjà vu le théâtre-forum du 28 septembre et celui du 27 avril que la cie NAJE était venue jouer pour les dix ans de l’Ecume du jour. Le spectacle a duré 2H 10, sans fatigue et une belle énergie du public. Lors de la fouille policière, alors qu’il y avait un spectateur en train de faire une intervention, j’ai senti un mouvement très doux du public. Une vingtaine de personnes ont envahi le plateau, tranquillement et forçant les policiers à renoncer à la fouille et à s’en aller. Ce fut très émouvant, la force du collectif. Les interventions se sont succédées à toute vitesse, le public étant porté et plein de propositions toutes différentes. Les 4 scènes, histoires difficiles et douloureuses ont même permis de rire. Des spectateurs ont fait des propositions originales comme ce jeune adulte qui vient voir les policiers en participant complètement à ce qu’ils demandent en riant et en acceptant tout, ou touchantes comme ce jeune de l’atelier de l’après-midi qui est venu voir le juge en disant simplement : «  Je ne veux pas que vous placier mes enfants. » alors qu’il est lui-même un jeune placé hors de sa famille.

Après le départ des spectateurs, nous avons convenu de faire un bilan le 20 juin avec ce groupe et l’équipe de l’écume du jour. Nous imaginons déjà des perspectives pour l’année prochaine.

Compte-rendu d’atelier Jeunes de Beauvais 2006/2007

L’Ecume du Jour, bistrot d’échanges de savoirs, a mis en place cet atelier avec l’aide et les financements de la PJJ et de la mairie de Beauvais.

Marie-France Duflot a animé cet atelier. Matthieu Suire l’a rejointe les 23 et 24 mai.

L’Atelier s’est déroulé à l’écume du Jour , dans la salle d’expositions, 14 mercredis de 15h à 18 h du 10 janvier 2007 au 24 mai.

Pour faire connaître cet outil, L’écume du jour a fait venir la compagnie NAJE qui a joué au Cinéspace, le 28 septembre, l’après-midi devant des jeunes de la PJJ, des classes de collège et de lycée, des femmes venues avec une association d’insertion…

Pour sensibiliser les jeunes et favoriser leur venue à cet atelier, 3 ateliers l’après-midi en novembre et décembre 2006 ont été organisé. Ensuite les jeunes ont formé le groupe.

Ce groupe était composé, de 2 frères de 9 et 11 ans, d’1 jeune de collège, de 5 jeunes de 14,15 ans d’une maison d’enfants, des 2 éducateurs qui les accompagnaient,de 2 jeunes adultes de l’Ecume du jour : au total, 12 personnes.

Un des éducateurs étaient d’origine maghrébine.

3 personnes ont commencé l’atelier et ne sont pas restées : Une jeune adulte de l’Ecume qui a trouvé du travail, une jeune d’un foyer d’éducation fermé, un jeune de la maison d’enfants.

Pendant la période de sensibilisation, il a eu peu d’essais, 3 personnes ne sont venues qu’une fois.

Le groupe a mis du temps à se constituer pour plusieurs raisons :

. les 2 enfants ont été souvent absents parce que certains mercredis, ils avaient école.

. les jeunes de la maison formaient déjà un groupe avec ses propres tensions,

. la présence des éducateurs n’a pas facilité, au départ, la mise en confiance

. la différence d’âge entre les jeunes et les jeunes adultes

Malgré cela ou peut-être grâce à cela, le groupe est devenu solidaire mais petit à petit. En fin de travail et lors du spectacle, il a montré une capacité à gérer et sa vie de groupe, relations, petits conflits et le forum.

Comme toujours, je commence un atelier par des jeux. Il a fallu moduler, avec les adultes qui aimaient ça et qui comprenaient l’intérêt des jeux et les jeunes qui avaient l’impression de régresser lors des jeux qu’ils n’effectuaient qu’à contre-coeur. Chaque atelier finit par un « ça va? ça va pas? », petit bilan personnel, devenu rituel et peu à peu investi.

Les jeunes ont raconté des histoires de collège, d’humiliation de professeur, de défense d’un handicapé, de bagarre, de pression du groupe, de vexation verbales, des situations où ils étaient pratiquement toujours soit témoins, soit héros. Ils n’ont pu raconter leurs histoires plus intimes, soit parce qu’ils vivent ailleurs ensemble en internat, soit parce que leur histoire est trop lourde et qu’ils en ont honte.

Les enfants se sont plus confiés, et ont raconté des histoires de maltraitance familiale.

Les adultes aussi se sont livrés : histoire de discrimination, d’insultes, de boulimie, de tournante, de honte à être jeune de foyer.

Comme les adultes ont raconté des histoires très intimes, les jeunes n’ont plus eu l’attitude de jeunes avec des éducateurs ou animateurs. Ils les ont regardés comme des personnes venues là pour elles-mêmes, d’abord. Le fait de jouer les histoires des adultes, les a posés comme aide et non comme victime. Sans doute cela les a aidés à grandir, car ces jeunes ont des histoires où ils sont des victimes. De faire forum entre nous, les a informés aussi des difficultés à être jeune et adulte, des solutions pour ne pas subir, les grandes lois qui régissent l’humanité, les interdits, les droits…

Nous avons choisi ensemble 5 histoires, représentant les différents thèmes abordés : discrimination en stage, violence au collège, exclusion, relation garçon-fille, être jeune de foyer. Nous nous sommes mis d’accord sur le titre de notre spectacle : « Ouvre-la! »

Dès que j’ai écrit les textes à partir des improvisations faites, surtout les jeunes ont été soulagés. Enfin cela ressemblait à ce qu’ils imaginaient du théâtre : des textes à la main, des lectures, des déplacements, des répétitions.

Les dernières séances ont avancé au gré de leurs humeurs, mais chaque séance a permis de voir se profiler la réussite du spectacle. A la fois cette peur qui monte, ce plaisir à jouer et sentir qu’on va y arriver. Nous avons ces derniers moments effectués un travail de comédiens, moi les dirigeant et eux apprenant la rigueur du jeu et de la répétition.

La veille de jouer , Matthieu Suire, comédien à la Cie NAJE, nous a rejoints pour prendre certains rôles d’oppresseurs, difficiles à porter en forum. Le groupe l’a rapidement adopté et cela les a soulagés. Nous avons répété dans le théâtre de Beauvais où nous nous somme retrouvés le lendemain à 10 heures pour faire un dernier filage, et un pique nique avant le spectacle de 13h45.

4- Nous avons joué « Ouvrez-la ! » à 13h45 au théâtre de Beauvais, devant 80 personnes. Les classes de 3ème n’ont pu venir car c’était le Brevet blanc. Des jeunes d’un centre d’éducation fermé, du public de l’Ecume, des jeunes de la maison d’enfants, des anciens, bref un tout public. J’avais préparé ce spectacle en pensant à un public de scolaire. J’ai eu assez peur car nos scènes concernaient vraiment les jeunes et je ne voyais pas comment des adultes pourraient intervenir. En tant que joker, j’ai donc proposé aussi à des adultes de venir accompagner les jeunes, ou d’agir en tant qu’ adulte.

Nos cinq scènes ont eu un beau succès :

. Un marchand de tabac insulte des enfants de « foyer » parce qu’ils ont abîmé sa vitrine.

. Une jeune fille se fait moquer par ceux de sa classe car elle est « grosse », mal habillée et qu’elle n’est pas aimable.

. Des jeunes au collège viennent se moquer d’un jeune handicapé, celui qui prend sa défense est pris à parti.

. Un jeune d’origine maghrébine se voit refuser un stage alors qu’une copine de sa classe l’obtient après son passage.

. Une jeune fille se fait tourner par des plus âgés.

Il y a eu 4 à 5 interventions sur chacune des scènes, des jeunes venant argumenter avec des notions de droits, d’autres discutant pied à pied avec les adultes sans se départir de grand calme.

Le groupe a bien réagi en forum et ont joué avec leurs émotions. Le spectacle a duré 1h40.

  Après le départ des spectateurs, nous avons fait un bilan rapide du travail.

Les jeunes qui souvent étaient froids et distants lors des « ça va? ça va pas? » des fins d’ateliers, ont un peu lâché des mots doux : Certains voulaient recommencer l’année prochaine, malgré leur ennui, ils avaient beaucoup appris et apprécié.

Les jeunes adultes, eux ont été dithyrambiques : C’était formidable, ils avaient beaucoup avancé…

Ils voulaient continuer.

Nous aurons un bilan le 20 juin avec l’équipe de l’écume du jour. Nous imaginons déjà des perspectives pour l’année prochaine.

 

 

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