Synthèse de Marc Souet après un séminaire à la faculté de Tours
 (2006)

Ce stage a été animé conjointement par Noel Denoyel (professeur) et Fabienne Brugel (comédienne) pour des Master et était centré sur le croisement du Groupe d’Analyse des Pratiques et le Théâtre-forum. Il a eu lieu fin 2006.


SYNTHESE UE29 EP7.1

Je rédige cette synthèse un mois après la fin du GAP. Lors de la dernière séance nous avons fait forum sur la situation que j’avais présentée et que j’allais vivre une semaine après, pendant les vacances de fin d’année. C’est donc l’occasion, pour moi, d’articuler le « ce qu’ils font de ce qu’ils disent » d’Yves Clot avec ce qu’il advint, après forum…

Je me souviens d’un très beau moment de formation où nous avons créé un espace vivant, d’accompagnement « dans tous ses états ». L’alternance des mises en actes avec les mises en idées a inventé un mouvement d’appropriation et de prise de conscience, comme la difficulté à faire vivre les notions qui fondent l’éthique, déterminent les distances, les mouvements et les langues de l’accompagnement. Les « petits exercices », présentés comme tels, par Fabienne Brugel, ont permis non seulement de comprendre que ce n’est pas d’être autonome qui est difficile, mais d’accompagner l’autre, en autonomie. Au fil du module, en groupe ou à deux, d’une écoute diffuse je suis passé à une écoute sensible de l’autre, et aussi de moi-même, cherchant à percevoir les signes infimes, les mouvements discrets, secrets parfois. Comme un cheminement vers la reconnaissance de soi.
L’utilisation des images nous a projetés vers un univers sensible, mais aussi offert, où rien n’est figé, où les possibilités de changement se tissent au fil des interventions.

La reprise des situations, en GAP, après le forum a créé l’espace de réflexivité et de réciprocité nécessaire à l’accompagnement de la situation problématique. L’idée d’avoir placé le forum avant le GAP, est très intéressante, dans la mesure où la réflexion a priori aurait pu occulter certains possibles, autorisés par le théâtre, et qui s’autorisent, a posteriori, par l’écriture du contre-don final.

Ce qu’il advint de mes vingt trois malades…
La situation que j’avais proposée a été choisie pour faire « forum ». Je voudrais pouvoir témoigner ici de ce qu’il est advenu de cette situation, qui restait à vivre, après le forum.
Je devais donc retravailler pendant les congés de fin d’année, seul, avec vingt trois personnes malades à voir quotidiennement. Je vivais cette obligation comme une contrainte et une coupure de ma formation en Master, d’autant que mon projet est de ne pas de poursuivre mon activité thérapeutique. Cependant je ne pouvais me résoudre à abandonner ces personnes.
Nous avons fait forum sur cette situation, et trois images ont été proposées : avant le conflit, pendant, et la pire des issues possibles. Je voudrais juste rappeler la dernière image : je suis représenté abattu sur une chaise les bras pendant, le dos arrondi, les malades dans le même état, abandonnés, le livre que je tenais serré dans mes bras dans les autres scènes, était tombé par terre. Cette image m’a accompagné tous les jours précédant la reprise de mon travail. Plusieurs possibles ont été joués en forum…
… ce qu’il advint fut autre chose.
Les malades m’ont souvent attendu. Sans autre consigne que « il faut voir tout le monde », j’ai alterné des séances thérapeutiques classiques avec des prises en charge de groupe, autour d’activités conviviales (préparation et prise de goûters). J’ai initié des séances de lecture avec des textes proposés par les malades et les miens aussi (mémoire, concentration, stimulation sont les termes récurant des prescriptions médicales !).
Pour la dernière dernière séance d’ergothérapie, j’ai « bouclé » le moment forum/situation par un clin d’œil : j’ai lu aux personnes présentes, le texte d’Henri Michaux « Mes Propriétés », trouvé sur le site de Naje. Enfin, j’ai pu rencontrer les médecins et discuter avec eux de la pertinence et du non sens d’une telle situation. Je devais retravailler pour les vacances de Pâques. D’un commun accord nous avons convenu qu’il fallait trouver une autre solution. Je ne retournerai donc pas travailler à Pâques…

J’ai réalisé ma dernière séance d’ergothérapie vendredi 5 janvier 2007 à seize heures… Marc Souet

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